Le Conseil d’Etat vient d’admettre qu’une répartition différente des résultats d’une société, votée en assemblée générale, que celle prévue dans les statuts ne constitue pas une clause léonine (réputée non écrite).
En l’espèce, une SCI avait été constituée par M. et Mme X, détenant 1% des du capital, les 99% restants entre leurs enfants. La SCI dégageait des déficits fonciers. Aux termes de deux AG extraordinaires, il a été décidé que les pertes constatées sur deux exercices seraient attribuées exclusivement à M. et Mme X. Ceux-ci ont alors déclaré les déficits fonciers dans leur totalité pour l’établissement de leurs revenus imposables au titre de ces deux années. L’administration fiscale a contesté ces déclarations, au motif que les décisions prises en AGE constituaient des clauses léonines. Le déficit foncier déclaré par les contribuables devait être limité à 1%, soit leur quote-part dans le capital social de la SCI.
L’administration fiscale estimait que la stipulation attribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l’exonérant de la totalité des pertes, celle excluant un associé totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes sont réputées non écrites.
Cette position n’a été retenue ni par la cour administrative de Paris, ni par le Conseil d’Etat. Les juges ont estimé que les décisions d’attribuer l’intégralité des pertes à des associés sur 2 exercices seulement, ne dérogeaient que de manière ponctuelle et temporaire au pacte social. Il ne s’agissait en aucun cas d’une décision définitive d’appropriation des pertes, comme des bénéfices par ailleurs. Ce raisonnement fait écho à un arrêt du Conseil d’Etat de 2008, où il avait été confirmé qu’une convention pouvait conférer des droits différents dans le résultat que ceux prévus dans le pacte social.
C’est bien cette notion de répartition ponctuelle qui met en échec l’application de l’article 1844-1 du code civil. Si la répartition inégalitaire n’avait effectivement pas de limitation dans le temps, les décisions prises en AGE constitueraient bien des clauses léonines, susceptibles d’être remises en cause par l’administration fiscal, et à juste titre.
Il convient donc de tirer de cet arrêt deux conditions pour qu’une répartition inégalitaire ne soit pas contestée :
- Être mentionnée dans un acte ayant une date certaine passée avant la clôture des résultats ;
- Avoir une limitation temporelle.
Cela peut être intéressant dans le cadre de SCP des professions libérales. En effet, en cas d’évolution à la hausse du chiffre d’affaires dû par exemple par une productivité plus importante de l’un des associés, il pourra être décidé de répartir les résultats en tenant compte de ce critère de rentabilité individuelle et ne pas répartir le résultat de l’année N, pour tout en partie, entre les associés, en fonction des droits de chacun dans la société, comme cela est habituellement le cas, sauf dérogation statutaire. Pourvu que celle-ci soit exceptionnelle et permette aux autres associés de rattraper ce retard d’efficacité sous peine d’une mésentente certaine à venir et d’un affectio société amoindri !
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